Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) a publié un rapport sur
La rémunération des contenus culturels utilisés par les systèmes d’intelligence artificielle.
Il s’inscrit dans la réflexion lancée par le ministère de la Culture sur l’utilisation des œuvres par les intelligences artificielles génératives.
Cette mission vise à concilier protection des créateurs et soutien à l’innovation.
Zoom sur les enjeux soulevés par le rapport
Rémunération des contenus culturels : l’alerte du CSPLA sur l’IA
Le développement rapide des systèmes d’intelligence artificielle générative pose des enjeux de souveraineté culturelle, notamment pour l’Union européenne, face aux modèles américains et chinois.
Selon le CSPLA, le cadre juridique actuel ne serait pas adéquat :
- L’exception de fouille de textes et de données (TDM) prévue par la directive 2019/790 est complexe, difficilement mise en œuvre et souvent peu respectée par les développeurs. De sorte que des SIA génératives s’entraînent sur des œuvres protégées sans autorisation ni contrepartie financière.
- Le manque de transparence sur les sources d’entraînement des intelligences artificielles empêche les titulaires d’exercer leur droit.
- Le mécanisme d’opt-out prévu n’est ni standardisé ni effectif et soulève des doutes au regard de la Convention de Berne qui interdit les formalités préalables pour bénéficier de la protection des droits d’auteur.
Le rapport s’interroge également des atteintes potentielles aux droits fondamentaux tels que les données à caractère personnel et les droits de la personnalité (voix, visage…).
Proposition de restructuration du marché
Rémunération des contenus culturels : l’alerte du CSPLA sur l’IA
Le CSPLA propose la création d’un marché de licences entre développeurs d’intelligence artificielle et titulaires de droits fondés sur les principes suivants :
- Respect du consentement des titulaires des droits d’auteur comme socle de droit exclusif.
- Mise en place d’un marché de licences négociées.
- Adoption d’une charte des bonnes pratiques encadrant les conditions d’exploitation des données culturelles
- Rémunération des contenus culturels utilisés par forfait ou proportionnalité selon des critères objectifs : ampleur de l’usage, nature des œuvres, taille de l’acteur IA.
- Rejet des dispositifs de licence légale ou de gestion collective obligatoire au profit d’une gestion collective volontaire.
- Constitution de bases de données annotées et sous contrôle des ayants-droits.
Proposition d’outils juridiques au service des créateurs
Rémunération des contenus culturels : l’alerte du CSPLA sur l’IA
Afin de rétablir un équilibre dans la chaîne de valeur, plusieurs instruments juridiques sont proposés par le CSPLA :
- Standardisation de mécanismes d’opt-out ou passage à une logique d’opt-in.
- Création et mise en place d’un médiateur de l’IA pour faciliter le dialogue entre les acteurs et faciliter la résolution amiable de litiges.
- Instauration d’une présomption d’utilisation illicite des contenus en cas d’indices sérieux (passage de robots d’indexation, ressemblances, utilisation de prompts « à la manière de » ou encore refus de divulgation de preuves devant le médiateur).
- Possibilités d’action de groupe en contrefaçon portée par des organismes de gestion collective, d’associations de défense des droits ou d’organisations syndicales ou professionnelles.
- Création d’un mécanisme d’injonction de divulgation de preuves à la charge des développeurs.
L’objectif poursuivi par le CSPLA est de restaurer l’accès au recours pour les ayants droit, sans nuire à l’innovation.
Le CSPLA souligne l’urgence d’une régulation adaptée fondée sur le dialogue entre les différents acteurs. La juste rémunération des contenus culturels utilisés par les IA constitue, selon lui, un enjeu central pour préserver la diversité culturelle dans un environnement numérique.
- CISAC, Study on the economic impact of Generative AI in the Music and Audiovisual industries, Complete study, Current situation and 5-year perspective, nov. 2024.
- CVL Economics, Future unscripted : The Impact of Generative Artificial Intelligence on Entertainment Industry Jobs, janv. 2024.
Avec la collaboration de Cléo Carraz, stagiaire, Diplômée du master 2 Droit du patrimoine culturel de Paris Saclay.
Marie Soulez
Avocate, Directrice du département Propriété intellectuelle Contentieux
Marie Soulez
Avocate, Directrice du département Propriété intellectuelle Contentieux
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- Email:marie-soulez@lexing.law
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