Un juge retient la notion de « fair use » en faveur de Meta

Le 25 juin 2025, le tribunal fédéral de San Francisco [1] a rendu une décision majeure en matière de contrefaçon, portant sur l’application de la notion de « fair use ».

Dans cette affaire, treize écrivains renommés reprochaient à la société Meta d’avoir utilisé, pour l’entraînement de son système d’intelligence artificielle, plusieurs de leurs œuvres protégées par le copyright, sans autorisation préalable. En défense, Meta invoquait le « fair use ».

Le juge a fait droit à cet argument, reconnaissant que l’utilisation des œuvres dans le cadre de l’entraînement du modèle pouvait relever d’un usage loyal au sens du droit américain.

Fair Use
fair use

Une décision menaçante pour les titulaires de droit ?

Un juge retient la notion de « fair use » en faveur de Meta

Dans la présente affaire, le juge a rappelé que « what copyright law cares about, above all else, is preserving the incentive for human beings to create artistic and scientific works » — autrement dit, que le droit d’auteur vise avant tout à préserver l’incitation des êtres humains à créer des œuvres artistiques et scientifiques.

Dès lors, le « fair use » ne doit trouver à s’appliquer que de manière strictement encadrée et il appartient aux défendeurs de démontrer le caractère loyal de l’usage qu’ils font des œuvres en cause, en satisfaisant aux quatre critères énoncés à l’article 17 U.S.C. § 107.

En l’espèce, Meta avait élaboré un solide argumentaire fondé sur le « fair use », convainquant le tribunal que l’utilisation des œuvres servait un objectif transformateur et non substitutif. Malgré ses réserves, le juge a statué en faveur de Meta, estimant que l’usage en cause pouvait être considéré comme loyal au sens du droit américain.

Absence de contrefaçon pour insuffisance de preuves

Un juge retient la notion de « fair use » en faveur de Meta

Cette décision, en apparence défavorable aux titulaires de copyright, traduit en réalité une approche pragmatique et équilibrée du juge face aux enjeux de l’intelligence artificielle.

Le juge en charge de l’affaire a souligné que les demandeurs n’avaient pas articulé les bons arguments à l’appui de leurs prétentions et qu’ils n’ont pas établi l’impact économique que l’utilisation de leurs œuvres par Meta pouvait avoir sur le marché.

Le juge rappelle en effet un principe fondamental du droit américain : il appartient au demandeur de prouver les faits de contrefaçon. Il ne suffit donc pas d’alléguer que ses œuvres ont été utilisées pour l’entraînement d’un modèle d’IA. Comme il le précise :

« Pour éviter toute responsabilité en matière de contrefaçon, les entreprises doivent généralement rémunérer les titulaires de droits d’auteur pour l’utilisation de leurs contenus. (…) [Mais] les tribunaux ne peuvent fonder leurs décisions sur des interprétations générales. Ils doivent se baser sur les preuves présentées par les parties ».

Fair use
fair use

« Les entreprises, pour éviter d’être tenues pour responsables de la violation du droit d’auteur, devront généralement rémunérer les titulaires de droits pour l’utilisation de leurs œuvres. (…) [Mais] les tribunaux ne peuvent pas statuer sur la base de considérations générales ; ils doivent juger au vu des preuves produites par les parties ».

Son raisonnement ouvre la voie à une interprétation mesurée du « fair use », permettant de favoriser l’innovation technologique tout en laissant subsister des garde-fous en faveur des créateurs.

En d’autres termes, cette décision marque un pas important vers la reconnaissance d’un équilibre entre la protection des auteurs et la liberté d’expérimentation propre à l’intelligence artificielle qui constitue aujourd’hui un moteur essentiel du progrès scientifique et culturel.

  1. US DC Northern California, 25 juin 2025, META Platforms, Inc., Case No. 23-cv-03417-VC, Doc. 598.

Avec la collaboration de Lou-Salomé Wang, stagiaire, diplômée du Master 2 de Propriété Intellectuelle Appliquée de l’UPEC.

Marie Soulez

Avocate, Directrice du département Propriété intellectuelle Contentieux

Pour en apprendre davantage

Le Règlement européen sur l’intelligence artificielle constitue un outil essentiel pour comprendre les enjeux juridiques et techniques que pose le RIA (ou AI Act). L’ouvrage analyse et souligne les points clé et analyse article par article ce texte...

La cobotique juridique #3 : Les malfaçons. Ce troisième épisode détaille les différents facteurs de malfaçons et comment les corriger...

Retour en haut