Telegram contraint de transmettre à Free des données d’identification

données d’identification

Les données d’identification d’un pirate sont indispensables aux besoins de l’enquête.

Le 12 novembre 2024, le Tribunal judiciaire de Paris ordonne à Telegram de communiquer à Free les données d’identification d’un utilisateur dans le cadre d’une affaire de rançongiciel (1).

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Free, victime d’une rançongiciel

Telegram doit de transmettre à Free des données d’identification

En l’espèce, Free a été victime d’un piratage informatique par ransomware au cours duquel les données personnelles et bancaires d’abonnés ont été impactées. L’attaquant a exigé le versement d’une rançon de 10 millions d’euros en cryptomonnaie par l’envoi de trois messages sur la plateforme délégué à la protection des données personnelles (DOP) et d’un message par l’intermédiaire de la messagerie électronique Telegram.

Free saisit alors en référé le Tribunal judiciaire de Paris afin que celui-ci ordonne à Telegram la communication de diverses données d’identification permettant de déterminer la personne à l’origine de ce message. 

L’article 145 du code de procédure civile prévoit que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé »

Pour obtenir de telles mesures, les quatre conditions suivantes doivent être satisfaites :

  1. l’absence de procès devant le juge du fond ;
  2. l’existence d’un motif légitime ;
  3. l’intérêt probatoire du demandeur ;
  4. la nature légalement admissible de la mesure demandée.

L’absence de procès au fond

Telegram doit de transmettre à Free des données d’identification

En l’espèce, Free a déposé une plainte auprès du procureur de la République. 

Toutefois, le dépôt d’une plainte ne caractérise pas un procès au fond. Par conséquent, la condition tenant à l’absence de procès devant le juge du fond est satisfaite. 

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L’existence d’un motif légitime

Telegram doit de transmettre à Free des données d’identification

Les articles 323-1 et 323-3 du code pénal sanctionnent l’accès, le maintien et les atteintes aux données des système de traitement automatisé de données. L’article 313-1 du code pénal sanctionne quant à lui l’escroquerie

En l’espèce, le pirate informatique récupère des données personnelles et bancaires d’abonnés de Free et envoie ensuite un message au président du groupe Iliad, par l’intermédiaire de la messagerie électronique Telegram, proposant à Free d’acheter sa propre base. 

Free dépose alors une plainte auprès du procureur de la République. 

Par conséquent, Free justifie d’un intérêt légitime à obtenir les éléments permettant d’identifier l’auteur du message en vue d’engager une action au fond contre le ou les auteurs des infractions qu’ils dénoncent. 

La nature légalement admissible des mesures sollicitées

Telegram doit de transmettre à Free des données d’identification

Conformément aux articles L.34-1 et R.10-13 du code des postes et des télécommunications, les opérateurs de communications électroniques doivent conserver les données d’identification des utilisateurs, notamment pour les besoins des procédures pénales.

Il s’agit des données personnelles, telles que le nom, le prénom, l’adresse postale ou le numéro de téléphone, mais également l’identifiant et le pseudo utilisé, ainsi que les données relatives au paiement. 

Le Tribunal judiciaire de Paris estime qu’en l’espèce les faits « sont susceptibles de constituer les infractions d’accès et maintien frauduleux dans un système de traitement automatisé de données, d’extraction et de détention frauduleuses de données contenues dans un système de traitement et de tentative d’escroquerie ». 

Selon le Tribunal judiciaire de Paris, ces faits relèvent de ceux pour lesquels les opérateurs de communication électroniques doivent conserver les données d’identification pendant une durée de cinq ans et justifient la communication des données d’identification pour les besoins des procédures pénales.

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L’intérêt probatoire du défendeur

Telegram doit de transmettre à Free des données d’identification

Le Tribunal judiciaire de Paris estime que la demande de communication des données d’identification est « proportionnée et adaptée à l’objectif poursuivi » par Free aux fins de poursuites engagées contre les auteurs présumés d’infractions pénales. 

Il relève en l’espèce que le droit à la protection des données ne prévaut pas face au droit au respect de la vie privée des abonnés de Free dont les données personnelles et bancaires ont été détournées.

Le tribunal judiciaire ordonne la communication des données d’identification

Telegram doit de transmettre à Free des données d’identification

A la lumière de ces éléments, le Tribunal judiciaire de Paris ordonne à Telegram de communiquer à Free, pour les besoins des poursuites pénales, dans un délai de 48 heures, toutes les données d’identification de la personne à l’origine du message litigieux. 

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  1. Ordonnance de référé, Tribunal judiciaire de Paris, 12 novembre 2024.

Avec la collaboration de Manon Juby, stagiaire, étudiante en Master Droit des espaces et des activités maritimes.

Raphaël Liotier

Avocat, Directeur de l’activité Pénal de l’informatique et du numérique

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